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Alcide d’Orbigny et les Rudistes

Présentation de quelques rudistes :

 Vaccinites giganteus, Hippurites radiosus, Requienia ammonia, Diceras : Bivalves marins fixés, en général d’assez grande taille, du Jurassique supérieur et surtout du Crétacé, disparus il y a – 66,5 Ma en Europe occidentale, - 68 Ma dans les Caraïbes,  les USA et l’Oman, après avoir évolué près de 90 Ma sur notre planète. En Europe, ce sont des fossiles surtout du pourtour méditerranéen ; ils se sont formés sur la plate-forme de la Téthys, dans une eau chaude, tropicale, peu profonde (-50 m), claire, riche en bicarbonate de calcium (la coquille des rudistes est épaisse). Ils ont formé souvent des bancs importants (ou biostromes) où les rudistes sont juxtaposés sur un ou plusieurs étages (Rennes-les-Bains (Aude), La Cadière d’Azur près de Toulon (Var).

Alcide d'Orbigny

        Alcide d’Orbigny, naturaliste et paléontologue, né en 1802, à Couëron (Charente-Maritime), fait ses études classiques à La Rochelle, gagne ensuite Paris en 1824, se fait remarquer en 1825 par les professeurs du Muséum (Cuvier, Geoffroy Saint Hilaire, Brongniart, . . . ) pour ses travaux sur les Foraminifères (êtres unicellulaires, microscopiques, entourés d’une coquille calcaire), publiés en 1826 : classification de 600 espèces fossiles et actuelles rendue possible grâce au microscope paternel et à l’observation de  sables de différents pays fournis par des capitaine de navires. Naturaliste voyageur du Muséum national d’Histoire naturelle, il accomplira de 1826 à 1834, une difficile mission d’exploration scientifique, géographique, ethnographique et anthropologique en Amérique du Sud (Argentine, Bolivie, . . .) dont il enverra et ramènera de très nombreux échantillons au Muséum (voir diaporama). Ce fut une expédition très intéressante mais dangereuse, dure physiquement.

       A son retour d’Amérique, il écrit : Voyage en Amérique méridionale  (dédié au roi Louis Philippe), 11 volumes, 4747 pages ; puis en 1839 L’homme américain sous ses rapports physiologiques et moraux.   Il est bienveillant envers les populations indigènes et, parfaitement intégré, parle le guarani. Son Voyage en Amérique méridionale  est tiré en 500 exemplaires et sera réédité à plusieurs reprises ; on remarquera ses grandes qualités d’écrivains, comme la clarté et l’élégance du style.  A son retour en France, il présente à plusieurs reprises sa candidature au MNHN comme professeur, mais essuie chaque fois un refus.

       A partir de 1839-40, fatigué par des années de voyage, déçu par de mesquines rivalités, d’Orbigny se réfugia dans le travail au milieu de ses collections. Il écrit de nombreux ouvrages célèbres :

. La Paléontologie française avec pour sous-titre Description zoologique et géologique de tous les animaux mollusques et rayonnés fossiles de France, 1840-1860, 4000 pages, 1440 planches de dessins lithographiées par J. Delarue, 2800 espèces étudiées : il  y pose les bases d’une classification rigoureuse des espèces.

. Le  Cours élémentaire de paléontologie et de géologie stratigraphique, 1849-1852, 3 volumes, 17 tableaux.

. Le Prodrome de Paléontologie stratigraphique universelle des animaux mollusques et rayonnés, 1850-1852, 1017 pages non illustrées ; il y établit des corrélations stratigraphiques entre des formations sédimentaires géographiquement éloignées les unes des autres. La théorie de Wagner sur la dérive des continents, en 1920, lui aurait donné l’explication.

Dans son Cours élémentaire, il propose la première échelle des temps  géologiques, il définit les étages géologiques et en détaille les caractéristiques contre l’opinion de l’ensemble de ses collègues qui s’opposent à l’idée de lier terrains et fossiles dans une même unité géologique.                                                                                                                                                                                                                           Il s’est intéressé à plusieurs reprises aux rudistes, en 1839, lorsqu’il étudie les Caprines de l’Île d’Aix, en 1850 quand il crée 42 espèces nouvelles de Rudistes dans sa Paléontologie française.

         Créationniste comme Cuvier (mort en 1832), d’Orbigny n’adhère pas à  la théorie de l’évolution et à la sélection naturelle décrite dès 1844 par Charles Darwin, ce qui lui fût reproché.

En 1846, à la Faculté des Sciences de Paris, il passe deux thèses : une en géologie sur les Ammonites, l’autre en zoologie sur les Bélemnites, il est nommé docteur ès sciences naturelles puis obtient un poste de professeur adjoint de géologie à la faculté, remplaçant Constant Prévost.

Le 29 juin 1853, meurt Adrien de Jussieu, titulaire de la chaire de botanique de la campagne et le 5 juillet 1853, un décret lui substitua une chaire de paléontologie.   D’Orbigny est nommé enfin, le 5 juillet 1853, par Napoléon III, avec l’accord du ministre de l’Education nationale, Hippolyte Fortoul, à la Chaire de Paléontologie nouvellement créée contre l’avis des professeurs du MNHN ; son laboratoire est sous les combles et l’accès aux collections de paléontologie lui reste interdit ! La nomination dans cette chaire, si méritée et si longtemps désirée, représentait toutefois pour d’Orbigny le couronnement de sa vie ; il commence alors ses cours en 1854 et les poursuit jusqu’en 1856.                                     Il est président de la Société géologique de France de 1843-1856.

                            

       De constitution solide, il voit sa santé déclinée  en 1850.   Il meurt en 1857, à 55 ans, à Pierrefitte-sur-Seine, sans doute de la maladie de Chagas : maladie des muscles à évolution lente (10 à 20 ans), avec des lésions irréversibles notamment au niveau du  cœur, maladie transmise par une punaise (le Tritoma  qui inocule le Trypanosoma cruzi), attrapée lors de son voyage en Amérique du sud. Il était également atteint du paludisme. Son immense collection d’Invertébrés (100 000 fossiles, plus de 14 000 espèces) est inventoriée par Hippolyte Huppé, aide–naturaliste au Muséum qui établit en 1860 un catalogue des espèces étudiées dans la Paléontologie française, en double exemplaire, un pour le Muséum, l’autre pour les Archives nationales. La collection est groupée ensuite dans la grande et belle  « salle d’Orbigny » située dans le  Laboratoire de Paléontologie. Elle est offerte en 1898 par Albert Gaudry, beau-frère d’A. d’Orbigny, alors titulaire la chaire de paléontologie du Muséum.

De 1861 à 1894, la Paléontologie française inachevée en 1857 est reprise par les chercheurs du Comité scientifique (G. Cotteau, E. Piette, de Fromentel, de Saporta, de Loriol, . . .) dont le président est le Vicomte Adolphe d’Archiac (1802-1868), qui poursuivent l’œuvre de d’Orbigny, exploitant les nombreuses notes laissées par lui sur chaque espèce. Le nombre très élevé des espèces types de la collection, forme un héritage scientifique important pour des études modernes de paléontologie et de biostratigraphie.

       Les espèces de la Paléontologie française d’A. d’Orbigny ont été révisées récemment sous la conduite du Professeur J.C. Fischer (1930-2009), paléontologue et ammonitologue au Muséum.                

 Un hommage international pour le bicentenaire de sa naissance a eu lieu en juillet 2002, au Muséum de Paris, sous la conduite du Professeur P. Taquet (professeur de Paléontologie) et de M.T. Venec-Peyré, spécialiste des Foraminifères. Le colloque avait pour thème  Alcide d’Orbigny, sa vie, son œuvre, histoire de la stratigraphie de d’Orbigny à nos jours. L’hommage  à ce brillant naturaliste et paléontologue du 19° siècle, a été rendu également en France à La Rochelle et à Couëron, en Bolivie à La Paz et à Santa Cruz de la Sierra.

Nécrologie d’A.d’Orbigny par Paul Fischer (assistant du Pr. Adolphe d’Archiac), 1878, BSGF :

« Par sa dimension stratigraphique, l’œuvre monumentale d’Alcide d’Orbigny est celle qui contribua le mieux à donner une signification aux fossiles »

                                                                                                    Jacqueline Macé-Bordy

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